Le 28 Octobre 2022
Le 21 Octobre 2022, La co-présidente Biologie Médicale de la FNSIP-BM, Florence Guillotin, était interviewée par le magasine What’s Up Doc sur l’avenir de la biologie médicale, et notamment la problématique de la baisse d’attractivité de la spécialité auprès des médecins reçus aux ECNi.
La Biologie médicale est en bas de classement des choix des internes, pourquoi ?
Il y a plusieurs raisons. Premièrement nous sommes peu représentés par rapport aux autres spécialités médicales. Même si la biologie est une discipline transversale, au final pendant les études, on parle très peu de biologie médicale en tant que telle. Durant, les stages de fin d’étude, on envoie les étudiants dans les laboratoires sur les automates. Ils voient peu les aspects cliniques de la profession. Cela n’encourage pas les étudiants à y aller.
Cela a toujours été comme cela ?
Il y a eu une grosse révolution, jusqu’en 2010, elle faisait partie des spécialités choisies avec des rangs médians autour des 3 500 avant une dégradation qui nous a fait passer au-delà des 7 500 en rang médian. Elle a souffert du regroupement des laboratoires, qui rend difficile de s’installer à son compte. Or c’est quelque chose à laquelle tiennent les médecins. La certification des analyses médicales aussi a engendré de faire beaucoup de paperasse pour accréditer les laboratoires. Cela nous a fait perdre le lien avec la clinique pour se concentrer sur l’accréditation. Maintenant que c’est passé nous essayons de réinsuffler une mission clinique pour reprendre le métier de biologiste comme il était initialement.
Comment faire pour que la biologie médicale retrouve ses lettres de noblesses auprès des internes ?
Ce que je peux vous dire c’est que la biologie médicale est l’une des spécialités où il y a le plus de diversité de métier. Nous n’en avons pas conscience car les stages sont faits dans les laboratoires. Mais les domaines sont divers et variées. Cela va de la recherche, l’hématologie, l’innovation, au management. Nous pouvons travailler au commissariat d’énergie atomique, dans les industries de diagnostic in vitro. Les médecins ne se rendent pas compte de toute la richesse de la discipline. Il y a aussi des activités de consultation. Beaucoup nous disent que l’on perd le lien médecin-patient, qui est quand même très cher aux étudiants en médecine. Or, en biologie de la reproduction et en hémostase il y a beaucoup de consultations et ce sont des biologistes qui les réalisent.
Il y a aussi toute une partie d’explication de résultats, de lien avec les cliniciens de bilan et même en amont de conseils aux prescripteurs pour optimiser les bilans et pour driver des analyses complémentaires.
Avez-vous beaucoup de postes vacants dans la spécialité ?
En sortie d’internat il y a énormément de postes vacants. La démographie de la biologie médicale est catastrophique. Il y a une
pyramide des âges en notre défaveur. Il y a des postes vacants dans tous les secteurs que ce soit privé ou public. C’est un vrai problème.
Nous perdons environ 100 biologistes par an entre ceux qui partent à la retraite et ceux qui arrivent sur le marché. Il y a un manque flagrant pour couvrir les besoins de la population.
Une meilleure communication autour de la spé pourrait améliorer ce bilan ?
Nous sommes en train de faire des campagnes de communication sur la biologie médicale et sur sa diversité pour sortir de cette image de spécialité qui ne se pratique que sur des automates. Nous voulons montrer la richesse du métier. Certains syndicats de biologistes ont fait une campagne avec des vidéos. Nous sommes aussi en train de monter une campagne où nous allons interviewer des biologistes qui ont diverses approches du métier pour les diffuser. Nous aimerions également mettre en place une refonte des stages en laboratoire au cours des études de médecine pour montrer le métier de biologiste sous divers aspects. Nos étudiants en troisième année se retrouvent sur
les automates, cela ne les pousse pas à choisir cette spécialité.
Que pensez-vous du PLFSS et du budget de la Sécu, en ce moment débattu ?
Cela nous inquiète énormément. Il y a deux choses : l’hôpital et le privé. À l’hôpital normalement il y aura peu d’impact. Dans les laboratoires privés par contre il va y avoir un gros impact. La Covid a entraîné une augmentation des bénéfices des laboratoires mais, nous avons dû recruter des salariés, acheter du matériel… Avec ce plan ce sont 250 millions d’euros d’économie sur les analyses de routine. Cela menace de mettre à mal la biologie médicale. Il y a une grosse crainte dans les syndicats. Cette vision que la biologie médicale a fait des bénéfices pendant la Covid et donc c’est à nous de payer, c’est compliqué à entendre car il y a eu un effort énorme de la biologie médicale pendant la Covid pour répondre très vite à l’innovation et au besoin de la population. Et là, on nous demande de faire des économies sur les bilans de routine, cela risque de déstabiliser cette offre dans certains territoires. S’il faut faire des économies, il y a un risque de devoir fermer des établissements dans certains endroits.
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